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Dear Esther: Est-ce un jeu?

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Alors, je me présente: Mario J. Ramos.

Après des études en cinéma, j’ai principalement travaillé comme scénariste sur les webséries québécoises Temps Mort et Projet-M, en plus de réaliser plusieurs courts métrages personnels. Mais bien avant ça, j’ai grandi avec des jeux vidéos. De Zelda II: The Adventure of Link à la trilogie Mass Effect, en passant par Warcraft II. Au début des années 2000, je suis tombé sur les New X-Men de Grant Morrison qui ont fait de moi également un passionné de bandes dessinées. J’ai donc beaucoup de passions, mais surtout, j’aime les partager. C’est donc naturel pour moi de sauter sur l’occasion de contribuer à TAG. Ces dernières années, je m’intéresse principalement aux jeux vidéo, car ils prennent une place de plus en plus « mainstream » dans notre société, et plus particulièrement aux développeurs indépendants qui amènent ce médium vers une nouvelle ère qui marquera le 21e siècle.

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Certains disent qu’un jeu comme Dear Esther, ce n’est pas un jeu. Bien que j’ai envie de dire qu’ils ont tort, ils ont peut-être raison. Après tout, qu’est-ce qui caractérise un jeu? Il y a des règlements, on peut gagner, on peut perdre…

En effet, Dear Esther ne semble pas posséder ces caractéristiques. C’est une promenade avec des voix off. On se rend d’un bout à l’autre, puis c’est fini.

Peut-être que les règlements sont les suivants : on gagne si on se rend au bout, on a perdu si on s’ennuie et qu’on ferme l’application avant la fin.

Peut-être aussi qu’on n’analyse pas cette oeuvre avec la bonne paire de lunettes. Après tout, comme tout bon médium qui se respecte, les paradigmes qui ont défini le jeu vidéo ont évolué. De l’arcade à la console maison, de Pac-Man à The Legend of Zelda, c’est déjà deux mondes totalement différents. Tout médium ou forme d’art connait ses balbutiements, ses évolutions, ses extrêmes…

Je ne crois pas que les concepteurs de jeux comme Dear Esther oeuvrent dans l’esprit de redéfinir le jeu vidéo, mais plutôt de provoquer la réflexion sur les possibilités qu’offre ce médium qui en est encore à son adolescence, et qui, tranquillement, s’infiltre dans toutes les sphères de la société et toutes les tranches d’âges. Peut-être aussi que ce sont simplement des raconteurs qui ont choisi le jeu vidéo comme le meilleur médium pour raconter leur histoire ou peut-être encore, veulent-ils nous rappeler que le concept de l’exploration est cruellement négligé dans les jeux AAA d’aujourd’hui.

 

Dans tous les cas, Dear Esther est avant tout un monde virtuel d’une grande beauté, accompagné par une envoûtante trame musicale par Jessica Curry. Le tout commence au bord de l’eau, près d’un phare. Il semblerait qu’on se retrouve sur une île. On se met à explorer, à regarder de près tout ce qui semble important, mais on ne peut rien manipuler ou amasser. En marchant à certains endroits, on déclenche en voix off, les réflexions d’un homme qui s’adresse à une certaine Esther. Le trajet n’est pas complètement linéaire; il est effectivement possible de manquer certaines narrations ou de manquer certaines apparitions fantomatiques si on ne regarde pas au bon endroit, au bon moment.

Tout au long de notre exploration, on essaie de trouver un sens à ce que raconte cette voix; d’observer chaque détail de notre environnement en espérant y trouver des indices, de comprendre qui nous sommes, où nous sommes et pourquoi nous sommes là. On observe, on écoute et on essaie de mettre ensemble les pièces du puzzle.

Un puzzle! C’est donc un jeu!

Un jeu où le joueur n’est pas pris par la main, où l’interface ne nous indique pas notre progression, où le but n’est pas de réussir à se rendre au bout, mais de comprendre.

Je l’avoue, je me suis rendu au bout et je n’ai pas tout compris. Mais je sais que, un jour, je retournerai à ces paysages mélancoliques et à ces cavernes scintillantes, car dans Dear Esther, l’exploration est sa propre récompense.

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Scénariste montréalais ayant gagné des prix Gémeaux pour son travail sur les webséries Temps Mort et Projet-M. Passionné de cinéma, bandes dessinées et jeux vidéo.

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