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D&D4 : le Vénérable à la peau (trop) neuve ?

Quand on parle jeu de rôle, difficile de ne pas évoquer le premier d’entre-eux : Dungeons and Dragons (D&D pour les intimes), créé en 1974 par les regrettés Gary Gygax et Dave Arneson. Cette licence est connue bien au-delà du cercle des seuls rôlistes, pour le meilleur (deux épisodes complets de l’excellente série Community, la série vidéoludique Baldur’s Gate…) comme pour le pire (les deux navets sortis au cinéma), et chacune de ses éditions met en ébullition la communauté à sa sortie. Aucune n’a déchaîné autant les passions que la dernière en date, Dungeons and Dragons Quatrième Édition ou plus simplement D&D4.

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Il faut dire que les auteurs de D&D4 ont pris le risque de rompre de manière assez radicale non seulement avec la troisième édition (un succès retentissant qui a redynamisé le milieu du jeu de rôle au début des années 2000) mais aussi avec certaines traditions héritées des éditions antérieures (en particulier le système de magie). Bien mal leur en a pris : D&D4 a essuyé de très nombreuses critiques, surtout de la part des fans de longue date qui ont crié à la trahison, et a été détrôné de sa place de « jeu médiéval-fantastique de référence » par un clone de sa troisième édition, Pathfinder. Face à ce camouflet, l’éditeur Wizard of the Coast décide de lancer une campagne de playtest pour une nouvelle édition après moins de quatre ans d’exploitation.

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Accusé d’être la pire édition de D&D parue ou de ne plus être D&D du tout (voire carrément plus du jeu de rôle), D&D4 a pourtant de nombreuses qualités qui plaident en sa faveur, en particulier l’énorme travail de simplification fourni pour rendre le jeu plus cohérent. Désormais tous les tests et toutes les classes de personnages fonctionnent sur un modèle unique : plus besoin de passer son temps dans les livres de règles pour savoir quel test faire dans une situation donnée ou comment fonctionne tel pouvoir de telle classe. Cette harmonisation a le triple avantage de fluidifier le rythme du jeu, d‘équilibrer les classes de personnage (un problème récurrent depuis la première édition) et de rendre D&D4 plus facile à prendre en main pour un néophyte.

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Non content d’avoir débarrassé le jeu de lourdeurs héritées des éditions précédentes, D&D4 introduit de nouvelles mécaniques qui, sous couvert de techniques pures et dures, ouvrent de nombreuses possibilités en matière de roleplay. La plus significative d’entre-elles est le défi de compétences : présenté comme une série de jets à effectuer pour résoudre une scène donnée, cette méthode laisse en réalité la part belle à l’improvisation et à l’ingéniosité car chaque joueur est libre de proposer une compétence de son choix à partir du moment où il motive ce choix. Au meneur de jeu de décider si l’impact sur la scène sera mineur ou décisif, mais nul joueur ne se retrouve écarté de l’action du fait des règles.

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Il serait fastidieux d’énumérer toutes les bonnes idées de D&D4 tant il en regorge (la gestion des pouvoirs, la mécanique de rituels / exercices martiaux, le découpage en échelon…) mais il n’est toutefois pas exempt de défauts : coûteux (il faut acheter au minimum trois livres pour jouer), aucun univers fourni avec le livre de base, scénarios officiels sans intérêt… Ce modèle économique totalement anachronique avec la pratique actuelle du jeu de rôle pourrait constituer la principale critique contre cette quatrième édition ; assez étrangement, c’est plus sur ses qualités nouvelles que D&D4 a été attaqué, ce qui me laisse à penser que cette cabale est fortement teintée de mauvaise foi, sur le refrain bien connu du « c’était mieux avant ».

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Vous l’aurez compris, le but de cette chronique est de réhabiliter D&D4 dont le seul tort a été de vouloir trop rénover le vénérable édifice qu’est la franchise Dungeons and Dragons, malgré des qualités indéniables qui en font selon moi le meilleur opus paru jusqu’ici (et je ne suis pas le seul à penser que D&D4 est un bon jeu). J’attends avec appréhension la cinquième édition, disponible dès juillet en VO (aucune information quant à une éventuelle sortie VF), car aucun parti-pris fort ne s’est dégagé du playtest qui a servi de base à cette nouvelle mouture, ce qui est compréhensible au vu de la mésaventure D&D4… mais qui serait préjudiciable pour le renouvellement et la vitalité du premier des jeux de rôles.

 
D&D4 est un jeu de rôle médiéval-fantastique de Rob Heinsoo, Andy Collins et James Wyatt, édité par Wizards of the Coast; édition française par Play Factory (malheureusement épuisée, l’éditeur ayant fait faillite)
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Un commentaire
  • Au Comptoir Rôliste 10 | De Cape et de Dés
    2 janvier 2020 at 19 h 36 min
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    […] & Dragons 4), un jeu qui a rompu trop brutalement avec la survendue 3.5 et qui a été rejetée par de (trop) nombreuses personnes qui n’y ont de toute évidence pas joué. Le gameplay unifié des classes était pourtant du beau boulot et certaines mécaniques étaient […]

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