Metal Gear Solid : Projet Rex
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Lecture au coin du jeu : notre avis sur Metal Gear Solid : Projet Rex

Qu’est-ce qu’une bonne adaptation ? Plusieurs réponses à cela mais pour moi une bonne adaptation n’est pas un « copier / coller » faignant plan par plan avec les mêmes répliques, peu importe la source et la cible du média. Avant de retranscrire sur un autre support une oeuvre il faut comprendre celle d’origine pour en ressortir le message principal ou une bonne partie sans pour autant reprendre exactement les mêmes circonstances. C’est pourquoi je considère, par exemple, la série The Walking Dead comme une très mauvaise adaptation du comic book car l’équipe derrière l’oeuvre télévisuelle n’a pas du tout compris ce que Kirkman écrivait. Même si c’est une mauvaise adaptation, cela reste tout de même une série bien réalisée, il n’y a de TWD que le nom et les personnages en somme. Je pourrais aussi parler du film Wonder Woman qui est dans la même veine mais je digresse trop car nous sommes réunis ici pour parler de Metal Gear Solid et de son adaptation en comic book.

Metal Gear Solid : Projet Rex

Retour en 98

Comme je vous le présentais il y a peu, l’éditeur Mana Books sort des livres adaptés de jeux vidéo depuis quelque temps en France. Issus principalement de chez Dark Horse, l’éditeur américain, ces comics reprennent des univers comme Deus Ex, Mass Effect, Overwatch ou Metal Gear Solid, jeu qui nous intéresse aujourd’hui. Hideo Kojima avait sorti un jeu vidéo qui est toujours cité parmi les plus grandes expériences des joueurs et joueuses, et si vous êtes passé.e.s à côté du titre de 1998, laissez-moi vous raconter ce quoi il s’agit.

Le héros se nomme Solid Snake et est un soldat d’élite. Il est appelé d’urgence suite à la prise en otage la base militaire de Shadow Moses en Alaska. Les terroristes, des anciens membres de Fox Hound, la même unité que Snake, demandent de l’argent et le corps d’un ancien et célèbre soldat, Big Boss. Si leur requête n’est pas acceptée, une attaque nucléaire sur la Maison-Blanche sera faite en représailles. Shadow Moses s’avère être une base d’essai d’un type d’arme révolutionnaire qu’est le très célèbre Metal Gear Rex, un robot bipède équipé d’un système de lancement de tête nucléaire. Snake est alors envoyé sur place pour s’infiltrer et stopper la menace. Très vite il rencontre le chef de la DARPA qui lui explique qu’il faut deux codes pour activer les armes et que ceux-ci sont presque entre les mains des militaires grâce aux pouvoirs psychiques de Psycho Mantis. Étrangement le haut responsable meurt d’une crise cardiaque inexplicable, Snake part donc sauver le détenteur du deuxième code. Il rencontre en chemin Revolver Ocelot et alors que le combat était très mal barré, Snake découvre un allié inattendu dans une armure de ninja. Le président d’ArmsTech ainsi sauvé, Snake apprend qu’il existe une carte pour désactiver le Rex mais avant qu’il ait eu le temps de tout expliquer, Baker meurt aussi d’une crise cardiaque. Notre héros part alors dans les tréfonds de Shadow Moses à la recherche de la carte et devra éliminer nombre de soldats de Fox Hound plus emblématiques les uns que les autres.

Metal Gear Solid : Projet Rex

Un style exact

Le duo derrière cette adaptation n’est pas très connu mais a réalisé un sacré travail ici. Tout d’abord, Ashley Wood au dessin, qui a travaillé auparavant sur Hellspawn ou Uncanny X-Men, a réussi à retranscrire une certaine émotion grâce à son expérience et son style bien à lui. Dans des tons très pastel et un trait aquarelle faisant penser directement au talentueux Dustin Nguyen (Descender), on ressent une sorte d’éloignement volontaire de la violence, comme si Wood ne voulait pas nous faire subir les atrocités suggérées par le récit. En un certain sens, on sent aussi une certaine mélancolie, un ras de bol du combat de la part de Snake qui se la coulait douce loin de toute violence comme le montre très bien le début du livre (moment qui était moins explicite dans l’oeuvre originelle). Avec ces couleurs très bleues, le dessinateur reste en surface mais illustre parfaitement ce que pourrait ressentir notre héros malgré lui. Parfois la coloration vient mettre un coup de Rangers dans les roustons avec un gros aplat de rouge au beau milieu d’une page afin de marquer un événement important et brutal, ou pour intelligemment illustrer le plan machiavélique des méchants, la sémantique des couleurs mettant alors en avant leur détermination sans limite.

La couleur est un élément intéressant et important de ce Projet Rex, on remarque par exemple que celle de Snake ne change que rarement durant sa mission, restant insensible tel un robot obéissant aux ordres malgré les différents twists et meurtres qui ont lieu durant les 304 pages de ce gros pavé. Je retiens aussi quelques planches magnifiques comme celle où on l’on voit pour la première fois le Rex. Dans l’ensemble Wood a fait un superbe travail et je ne pense pas qu’un autre style de dessin aurait aussi bien collé à MGS.

Metal Gear Solid : Projet Rex

Vous ai-je déjà dit que j’aimais vraiment beaucoup beaucoup ce robot ?

Aller à l’essentiel

Son compère, Kris Oprisko, est encore moins connu et a réalisé des scénarios pour CSI ou Underworld: Red in Tooth & Claw. Si les qualités de ces derniers me sont totalement inconnues, il s’avère que ce monsieur a fait du bon boulot sur Metal Gear Solid : Projet Rex. Même s’il y a des choses à critiquer, on peut dire que Oprisko ne s’est pas trompé dans le schéma général de son livre. Le début est un peu lourd car si on connait presque par cœur le jeu, on peut avoir l’impression de lire le script à la virgule près, ce même jusqu’au Codex – ces moments de pur dialogues entre les personnages – et même certaines phases où l’on est obligé de faire des détours pour chercher des grenades au début du jeu sont visibles dans le livre – on voit Snake éviter une caméra, ce qui est très utile dans le jeu pour vous expliquer une mécanique ne l’est pas dans le format papier car on ne voit plus du tout ce genre de situation en détail plus tard dans le bouquin.

Le début étonnamment un peu lourdeau et maladroit s’allège rapidement au profit d’une écriture plus libre et recherchée sans pour autant trahir la plume de Kojima. On félicite même la prise de risque freestyle YOLO comme des remarques osées envers Meryl (certes sexistes mais typiquement dans le caractère de Snake – attention on ne valide que parce que son personnage est comme ça hein !), de très bonnes idées comme le combat contre Mantis ou la suppression du combat de tirage d’oreille (quoi que j’aurais adoré une petite référence). Mon seul gros regret vient que l’auteur est passé à côté du principal message de Kojima. En effet si on recherche précisément ce que l’auteur japonais tente de dire depuis plusieurs années, on remarque que sa lutte contre l’armement nucléaire n’est pas aisément décelable dans l’oeuvre de Wood et Oprisko. Certes cela est mentionné de façon parcellaire et il aurait mieux valu un roman plutôt qu’un comics pour redire tout ce qui est expliqué dans le jeu de Konami mais on ne peut pas en vouloir vu le travail effectué.

Metal Gear Solid : Projet Rex

Une bonne adaptation ?

Les sujets comme les enfants soldats, les guerres incessantes ou les manipulations du gouvernement sont bien présentes dans ce Projet Rex. La citation en quatrième de couverture résume bien à elle seule le propos de ce livre : « Alors comme ça, le gouvernement ne t’a rien dit ? Classique. C’est ce que tu récoltes en étant l’employé modèle, Snake. On te ment, on te trahit et puis on te sacrifie. » Rien qu’avec ces phrases on ressent que Snake n’est qu’un pantin et cette sensation est parfaitement retranscrite à l’aide du travail d’illustration de Wood et la bonne adaptation de Oprisko qui a su choisir les bons thèmes de Metal Gear Solid sans sortir des lignes tracées par Kojima il y a vingt ans qui restent toujours d’actualité.

J’aurais aimé un axe plus orienté sur les armes de destruction massives mais le format n’est pas bien adapté pour cela et il suffit de relancer le jeu si on veut entendre parler de cela. C’est en ça qu’on reconnait une bonne adaptation, les plans du livre vont droit au but sans plagier le jeu vidéo et le message transmit est quasiment identique sans le trahir et sans tout réciter bêtement. Ici on devait lire un récit sur le fait que Solid est un vrai pantin où les trahisons apparaissent à chaque chapitre avec la prolifération nucléaire en périphérie et nous sommes bien servis.

Metal Gear Solid : Projet Rex

Metal Gear Solid : Projet Rex sort demain le jeudi 8 février 2018, fait 304 pages pour 18 sur 27,5 centimètres. Il est vendu 18 euros (ce qui n’est absolument pas cher pour un bouquin à couverture dure, autant de pages et une qualité de papier parfaite) dans toutes les bonnes crèmeries ou 12,5€ en numérique.

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Livre reçu gracieusement afin que nous puissions vous en parler. Merci !

Quelques photos en bonus, issues de mon tweet :

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Élevé à la sauce PlayStation, Thomas est un gamer touche à tout mais qui joue toujours à des anciens titres. Il partage cette passion depuis 2008 et est passé par toutes les cases, du blog à Dailymotion et même la radio pendant 4 ans. Il tente maintenant de faire découvrir ce milieu au plus grand nombre via TechArtGeek ou via des vidéos sur YouTube ou Twitch.

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